Petite histoire de la truffe
Il y a des milliers d’années, la truffe fascinait déjà et était très appréciée. Chez les Egyptiens, le pharaon Khéops, 4600 ans av. J-C, en raffolait. Un texte de 1600 av. J-C décrit la truffe comme étant un produit mystérieux de la terre et Théophraste (372-287 av. J-C) y voit un «végétal sans racines, engendré par les pluies orageuses d’automne».
Les Grecs et les Romains avaient la réputation d’être des amoureux déclarés de la truffe, à laquelle ils prêtaient des vertus thérapeutiques et aphrodisiaques. Avec l’effondrement de l’Empire romain, la truffe est tombée quelque peu dans l’oubli. Les Perses connaissaient aussi la truffe : le grand médecin iranien Avicenne en disait le plus grand bien et la recommandait à ses patients.
Au Moyen-Age, les dignitaires ecclésiastiques, qui avaient fait vœu d’abstinence, détestaient la truffe et ses vertus aphrodisiaques. Ce n’est qu’à la Renaissance que la truffe est revenue à la mode, et en force.
Cette passion pour la truffe se rencontre dans toutes les maisons royales d’Europe. Marie-Thérèse d’Autriche, par exemple, adorait ce tubercule, avec une prédilection pour sa préparation en omelette.
Au milieu du 19ème siècle, l’abondance était telle que l’on conseillait d’en mettre une livre pour truffer un chapon. Dans le Périgord, les paysans la consommaient comme un légume.
En Europe, où peut-on «aller aux truffes» ?
La truffe se montrant bien difficile sur le plan du climat, du sol et des plantes qui l’entourent, on ne la trouve que dans une aire bien délimitée, située environ entre quarante et quarante-sept degrés de latitude nord.
De la Touraine en France à la frontière italienne, elle dessine une bande qui passe par Libourne (Gironde) et le Périgord et longe la Méditerranée, avec un renflement dans la vallée du Rhône.
Cette bande se poursuit en Italie à partir d’Alba dans le Piémont et suit les Apennins jusqu’à hauteur de Rome. Dans la péninsule ibérique, on rencontre la truffe du sud des Pyrénées jusqu’à Guadalajara.
La truffe, ailleurs dans le monde
La Truffe Noire de Chine
Elle appartient à la famille des tubérales et regroupe les espèces Tuber Himalayense, Tuber Indicum et Tuber Sinense. Leur origine géographique se situe en Chine et plus particulièrement dans les contreforts de l’Himalaya. Parfois frauduleusement colorées par des escrocs, elles sont vendues comme de véritables truffes gastronomiques.
Le commerce de la truffe de chine n’est pas illicite, la fraude venant de ce qu’elle soit vendue pour de la melanosporum européenne. Sa consommation ne présente pas de danger, mais elle a moins de goût et a tendance à capter les odeurs voisines.
La truffe chinoise a un aspect de peau et de forme un peu différent de la melanosporum. Elle est un peu plus régulière, et surtout le veinage est caractéristique. Son diamètre peut atteindre sept centimètres.
La Truffe des Sables
La truffe blanche des sables d’Afrique du Nord «Terfizium Leonis» est appelée aussi truffe «blanc de neige» ou «terfez» dans le language local. Elle pousse dans l’Atlas et appartient à la famille des tubérales. Elle est plutôt brun clair et n’a pas de valeur gastronomique à cause de son moindre goût. Elle est surtout cuisinée dans les plats mijotés. Sa taille varie entre celle d’une noisette et d’une pomme et n’a pas une forme régulière.
La Truffe du Lion
En Iran, dans plusieurs régions, on trouve de la truffe. Les truffes iraniennes ont une couleur gris clair. Leurs tailles varient entre celle d’une noix et d’une orange. Le grand botaniste français Chatin les a appelées «Truffes de Montagne» ou «Truffes du Lion». Ce botaniste à longtemps étudié les truffes iraniennes et les a classées comme suit:
Terfezia aphroditis chatin :
région de production : l’Azerbaïdjan.
Date d’identification : 1897
Terfezia hafizii chatin :
région de production : les alentours de la ville de Téhéran et la province du Fars, dans le centre du pays. Date d’identification : 1892
Terfezia hanotauxii chatin :
région de production : le mont Alborz qui domine la ville de Téhéran, et au pied de la chaîne de montagne du Zagros (qui va de l’ouest du pays au centre sud).
Date d’identification : 1897.
Les truffes iraniennes poussent normalement au pied des hautes montagnes. Elles ont la particularité d’être anti-bactérienne et antivirus. Elles jouent un rôle important dans l’équilibre du cholestérol. Suivant les régions, elles poussent en automne et aussi, de début mars à la mi-avril. Ces truffes ne poussent pas beaucoup en profondeur. Suivant leur taille, elles créent des fissures à la surface de la terre, caractéristiques qui permet à la population de les trouver. Les truffes iraniennes et principalement Terfezia aphroditis chatin sont très riches en protéines.
En 2006, dans la région de l’Elam, dans l’ouest du pays, la population a trouvé une truffe pesant environ 3kg. Les différentes variétés de truffes iraniennes n’ont pas une grande valeur gastronomique. La population les mange comme légume, en les séchant pour pouvoir les consommer toute l’année.
La truffe : un mystère ?
La truffe est un champignon mythique. Depuis l’antiquité, les hommes n’ont jamais très bien su ce qu’était la truffe. Relevant tantôt du règne minéral, tantôt du règne végétal, issue du tonnerre et de la foudre, le monde médiéval la considérait comme une émanation du démon, rumeur répandue par des représentants de l’Eglise, hostiles aux plaisirs de la table…
Maintenant, nous savons que la truffe appartient à la famille des champignons ascomycètes. Ce qui fait qu’elle nous envoûte, n’est pas dû au champignon lui-même, mais à sa fructification, qui est le résultat d’une reproduction souterraine. Le champignon proprement dit n’est autre en réalité qu’un réseau très ramifié d’hyphes qui s’étend sur plusieurs mètres dans le sol, et qu’on appelle le mycélium. C’est de la rencontre entre les hyphes de différents types de champignons que résulte cette fructification. A condition que le temps soit de la partie et que le sol soit calcaire et riche en humus. A cela s’ajoute – ce qui complique encore la chose et d’autant la culture de la truffe – le phénomène du mycorhize. C’est ainsi qu’on désigne la relation étroite, et parfois symbiotique qui s’établit entre les réseaux de champignons et les racines des arbres.
La répartition des tâches entre les deux partenaires obéit à des règles très précises : la truffe produit de l’azote, du phosphore, du potassium et d’autres substances aussi importantes, tandis que l’arbre apporte de hydrates de carbone. Mais la truffe ne se satisfait pas de n’importe quel arbre. Seul certains sont élus : érable, bouleau, tilleul ou orme. Mais c’est avec le chêne qu’elle préfère s’unir.
Son nom de truffe vient du fait qu’elle pousse dans le sol à une profondeur de 5 à 30 cm environ, ce qui en surface peut générer l’apparition de quelques monticules. C’est la raison pour laquelle le Moyen-Age a recouru à la désignation de «terrae tuffolae» qui, par contraction lexicale, a donné «tartuffole», puis l’italien «tartufo» et enfin le français «truffe».
Extrêmement rare à l’état naturel, la truffe se laisse apprivoiser par les trufficulteurs pour le plus grand plaisir des gourmets.
Une trentaine d’espèces de ce tubercule sont répertoriées dont : la Truffe du Périgord (Tuber Melanosporum), particulièrement savoureuse, la Truffe d’Eté (Tuber Aaestivum) à l’odeur fine et légère mais à la saveur moins typique, ou encore la Truffe Blanche d’Alba (Tuber Magnatum Pico), récoltée en Italie dans la région du Piémont et reconnaissable parmi toutes grâce à sa couleur blanche, son parfum et sa saveur envoûtante.
La truffe est-elle aphrodisiaque ?
La réponse est incertaine et peut être liée à l’enthousiasme de la truie truffière à fouiller le sol pour en trouver. En effet, si la truie cherche naturellement les truffes, c’est parce qu’il émane de celles-ci des parfums similaires aux substances que l’on trouve dans les organes sexuels du porc. C’est son instinct qui la guide sur les traces d’un verrat.
Ce qui nous ensorcelle et qui tient pour beaucoup de son mystère, est due à la «testostérase», une substance presque identique à l’hormone masculine : «la testostérone».
Néanmoins, si les effets aphrodisiaques souvent imputés à la truffe ne vont pas jusqu’à s’exercer sur nous, les humains, il n’en demeure pas moins qu’elle fait appel en nous à une zone végétative subconsciente.
A ce propos le célèbre cuisinier, Brillat Savarin n’a-t-il pas écrit : «Alors continuons d’y croire et surtout d’en manger !»
Et comme le disait Alexandre Dumas : «Les gourmands de toutes les époques n’ont jamais prononcé le nom de la truffe sans porter la main à leur chapeau».
Ceci dit, que la Truffe soit aphrodisiaque ou pas, il faut reconnaître que c’est un tel plaisir d’en déguster…